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dimanche 30 mai 2010

Born in the wild, he died a thousand times…



Self portrait


La mort de Dennis Hopper me plonge dans un proche passé, non vécu mais tant fantasmé, celui de la fin des 50s et des 60s, puis 70s, 80s... émergence du Pop Art, de la contre-culture américaine et de certains films culte.

Dennis Hopper est né à Dodge City, ville incarnant la Frontière, à la limite du monde « sauvage » et civilisé. Lieu des guerres entre éleveurs et fermiers, entre cowboys et bandits, dont l’une des figures emblématiques était Whyatt Hearp, l’homme de OK Corral. Abritant aujourd’hui de gigantesques abattoirs, summum de l’aberration consumériste et catastrophe écologique en puissance [mais non, je n’ai pas décidé d’ouvrir à mon tour un cow-blog ; mais un jour peut-être que j’écrirai sur le gang du Hole in the wall…].


Dodge City, la sauvage …

Born in the wild donc.

Ses parents déménagent à San Diego. Repéré très tôt à Hollywood, il croise une étoile filante, James Dean, qui devient son mentor, son modèle, alors que Dean n’a que 5 ans de plus. Ils tournent ensemble Rebel Without a Cause (1955) et Giant (1956).



Dennis Hopper restera ainsi pour moi Jordan Benedict, le jeune homme malingre, introverti, de Giant, qui ose défier son père, la figure altière du riche texan, archétype de l'Américain joué par Rock Hudson. Mais soutenu par la tendre condescendance de sa mère, Elizabeth Taylor, patricienne de la Côte Est perdue dans l'immensité désertique. Devenant médecin dans le village des ouvriers mexicains misérables qui travaillent sur le ranch familial, il affronte finalement le nouveau riche, James Dean, tantôt cowboy funanbule sans le sou, tantôt balourd roi du pétrole grimé, vieilli et magnifique. (Il y aurait tant à dire sur Dean dans ce film...)







Dans une des scènes finales, alors que la famille rentre en voiture et s’arrête dans un dinner, une bagarre est déclenchée par le propriétaire qui refuse de servir la femme du personnage de Dennis Hopper, elle aussi médecin mais d’origine mexicaine (ou si vous préférez, hispanique).


Ce film est typique de certains films américains qui, sous couvert d’un divertissement à grand spectacle, nous donne à voir le cynique et éternel triomphe de l’élite wasp, pétrie de bons sentiments et d’ambivalence, sur tous les « nouveaux riches » issus du rêve américain.


Cette lecture peut surprendre pour un film qui peut être considéré comme assez mièvre mais c’est la mienne.


Après 56, profondément affecté par la mort de James Dean qu’il n’avait pas quasiment pas quitté pendant les mois de tournage de Giant, Hopper connu une période délicate. Voulant peut-être s’inspirer des exigences et de l’attitude de James Dean, il se rendit insupportable sur le film dirigé par Henry Hattaway, qui exaspéré par l’attitude de Hopper, lui prédit qu’il ne travaillerait plus jamais à Hollywood.

Il a vingt ans à peine.

Les rôles devinrent effectivement si rares qu’il laissa tomber et se rendit à New York notamment pour y suivre à son tour les cours du professeur de Dean, Lee Strasberg, à l’Actors Studio.

Devenu acteur pour la télévision avec des dizaines de rôle de western et autres séries, il était membre d’une toute nouvelle bohème new-yorkaise tout autant que californienne, groupe insolite d’artistes divers, artistes pop, écrivains et poètes. Parmi lesquels Andy Warhol, Allen Ginsberg… et Marcel Duchamp.


The Factory par Dennis Hopper

Détecteur de talents tout autant qu’acteur de la scène artistique, il était lui-même peintre, sculpteur, poète et photographe.


Paul Newman par Dennis Hopper - 1964


Warhol par Dennis Hopper


Mais avant tout un collectionneur de la première heure d’art moderne, tant à Los Angeles qu’à New York ; il acquis une des premières toiles d’Ed Ruscha, ainsi que de Roy Lichtenstein et l’une des fameuses « soupes » de Warhol pour … 75 dollars !

Collectionneur compulsif, il oscillait entre côte ouest et est, allers-retours qui illustre l’étonnante relation amour-haine entre LA, SF et NYC et la grande perméabilité des deux scènes culturelles américaines, jumelles et ennemies.

« Sinking Sun » de Roy Lichtenstein, acheté 1.100 $ fut revendu pour plus de 17 millions, mais cette toile ne lui appartenait plus. Il perdu en effet une (petite) partie de sa collection en raison de ses multiples divorces, aujourd’hui dispersée, la plupart dans les musées européens !


Hopper par Warhol



Une grande partie de ses propres première œuvres, disparut dans les flammes d’un incendie au début des années 60 (ce qui le fit renoncer à peindre pendant 20 ans) ; d'autres ont aussi beaucoup souffert du tempérament de ses épouses ou de leurs conflits, détruites par « d’intempestifs » déclenchements du système anti-feu.
Les flammes et les flots… plaies bibliques, il disait qu’il y avait eu peut-être aussi des locustes mais qu’il ne se souvenait plus trop. Car il n'avait pas toujours le pied sur terre, si on peut dire.



Bien évidemment, Easy Rider (1969) vient à l’esprit dans la suite de sa carrière. Co-écrit avec Peter Fonda, le film qu’il réalisa pour quelques centaines de milliers de dollar en rapporta des millions.

Film tragique, dans lequel les acteurs ne se contentent pas de fumer des menthols et de boire du jus de pomme… C'est toutefois Nicholson qui lui "vole" la vedette.

Ce film nous donne à voir une nouvelle image, cliché quasi instantané sinon prophétique de l’Amérique, ou plutôt des Etats-Unis, dure, amorale, hors normes. Celle qui bouge et celle qui restera éternellement immobile. Là encore, le film d’une élite qui regarde son propre pays en face et qui pointe du doigt ses défauts.

Une nouvelle image, une nouvelle société, un nouveau du cinéma aussi.

Pourtant, la même année, il figure dans un western avec… John Wayne !!

Eternel cycle des contradictions...

Je ne sais pas trop que dire de l'énorme succès commercial du film, Dennis Hopper déclarant lui-même qu’il était dû en grande partie au fait qu’il était diffusé au Vietnam où les soldats retournaient le voir plusieurs fois (cf le docu d’Arte diffusé récemment).


Ce succès lui vaut d’avoir carte blanche pour réaliser son prochain film, The Last Movie, (1971) tourné au Pérou dans une ambiance Drug, Sex and R&R particulièrement orgiaque.

Drogue, sexe et R&R. Et encore plus de drogue... Hopper fortement sous influence, l’editing du film dura plus d’un an avant d’être montré à New York, pendant quelques jours seulement. Un flop, classé parmi les 50 plus mauvais films.

Il me semble cependant, si je le sors de la machine de production hollywoodienne, que l’on peut le regarder d’un œil différent, préfigurant certaines « installations » ou vidéos d’autres artistes. Si un expert veut donner son avis...

Après cet échec, sombrant davantage s'il est possible dans la drogue et l’alcool (comme quoi...), l’enfant prodige d’Hollywood a déjà vécu plusieurs vies à 35 ans.
On le retrouve dix and plus tard, jouant un photographe halluciné dans Apocalypse Now (1979).

Après avoir été retrouvé nu en pleine crise d’hallu dans la jungle, il entre en cure de désintox.

1986 - Acteur de sa propre renaissance, il demanda à Lynch le rôle qu’il incarne dans Blue Velvet, prétendant qu’il « est » Franck. Encore un personnage hors normes, excessif dans le sexe et la drogue, abuseur trouvant son plaisir dans la violence et des pratiques sexuelles SM.

Renaissance de Dennis Hopper et révélation d’Isabella Rossellini, jusqu’alors modèle et icône de la mode, dans un rôle rare de femme à la sexualité à la fois affirmée et abusée.

Personnellement, ce film m’a bien plus troublée et me trouble encore, que Eyes Wide Shut. Et si je n’ai jamais fantasmé sur un acteur, Isabella, that’s another story…

Plus tard encore, Hopper incarne le marchant d’art de Jean-Michel Basquiat (Basquiat, 1996). La boucle semble ainsi se refermer, près de 50 ans après les débuts de l’acteur, du peintre et du collectionneur.



Bad boy excellant dans les rôles de vilains, amoral, indécent, obscène, blasphémateur (cf le self portrait ci-dessus, devant des magazines pornographiques et la scène avec Nicholson « Why Mother, why ? » au pied de la statue de la Vierge), Hopper vota républicain, allez comprendre, avant de rallier l’actuel président.


Lors d’une remise de médaille en France, il déclara que pour un gamin né dans une ferme de Dodge City, c’était un destin inespéré.


Singulier parcours, incarnation du rêve américain… de son enfer aussi.


Out of the Blue


« En 1979, Dennis Hopper entend à la radio la chanson phare de Neil Young: « My My Hey Hey ». Il se prend d’une telle passion pour ce morceau sur la mort et la régénérescence du rock, qu’il l’utilise comme thème l’année suivante pour son film Out of the Blue Out of the Blue. Dans ce morceau, on trouve un vers qui résume sa carrière: « It’s better to burn out/ than to fade away », « Plutôt brûler que s’effacer ». Tout au long de sa vie, tel un phœnix, il a su se brûler les ailes et se réinventer, renaître aux termes d’expériences limites. Ainsi sa vie d’artiste et de cinéaste est riche de flammes et d’explosions régénératrices. » Article Anonyme (c) Turner Movies – Dennis Hopper : l’Incandescent.


"The river flows, it flows to the sea
Wherever that river goes, that's where I want to be
Flow river flow, let your waters wash down
Take me from this road to some other town
All I wanted was to be free
And that's the way it turned out to be...

"Ballad of Easy Rider," by Roger McGuinn of The Byrds


It’s better to burn out/ than to fade away

5 commentaires:

502 a dit…

mais je suis complètement yes avec vous sur Blue Velvet. Un film plus que remarquable ! J'ai été très troublé par ce film également (et par beaucoup d'autres ambiances de Lynch, d'ailleurs, LostXway doit vous dire quelque chose...) et bref, je ne sais plus ce que je disais, si ce n'est que j'opine du bonnet en vous lisant (et en même temps, je remue la queue, ce qui n'est pas simple à faire, croyez moi).

FLOW a dit…

Je me risque à foutre le bazar dans vos commentaires, vous me pardonnerez? ;-)

Trois trucs qui me viennent avec Dennis Hopper:

1) Easy Rider et son ode la liberté
Pour l'anecdote: Pendant le tournage, on la retrouvé errant la nuit, sur une autoroute ivre mort, nu, en plaine crise de paranoïa.

Pendant qu'on le ramenait, il pensait que Wim wenders et Coppola le filmaient en caméra caché!!!
J'ai adoré la lucidité de cet homme, des années plus tard et "désintoxiqué", expliquant ses erreurs à coup d'anecdotes extraordinaires!

2) "So What" De Miles Davis, ce titre fût inspiré par Denis Hopper qui répétait sans cesse pour chambrer Miles Davis: "So What?", Un jour le grand Miles est arrivé avec ce titre et quel titre !!!

3) "if", un poème de Kipling récité d'un trait par Hopper comme un rapper. Je l'avais entendu à la radio, ça m'a filé des frissons:

If you can keep your head when all about you,
Are losing theirs and blaming it on you,
If you can trust yourself when all men doubt you,
But make allowance for their doubting too;
If you can wait and not be tired by waiting,
Or being lied about, don't deal in lies,
Or being hated, don't give way to hating,
And yet don't look too good or talk too wise:

If you can dream and not make dreams your master;
If you can think and not make thoughts your aim;
If you can meet with Triumph and Disaster
And treat those two impostors just the same;
If you can bear the words you've spoken
Twisted by knaves to make a trap for fools,
Or watch the things you gave your life to, broken,
And stoop and build 'em up with worn-out tools:

If you can make one heap of all your winnings
And risk it on one turn of pitch-and-toss,
And lose, and start again at your beginnings
And never breathe a word about your loss;
If you can force your heart and nerve and sinew
To serve your turn long after they are gone,
And so hold on when there is nothing in you
Except the Will which says to them:"Hold on!"

If you can talk with crowds and keep your virtue,
Or walk with Kings--nor lose the common touch,
If neither foes nor loving friends can hurt you,
If all men count with you, but none too much;
If you can fill the unforgiving minute
With sixty seconds worth of distance run,
Yours is the Earth and everything that's in it,
And--which is more--you'll be a man, my son!

Kipling


Vous m'en voulez pas trop? Petite française?

Fiso a dit…

Merci à toi pour ce bel hommage. J'ai appris sa mort ce matin et bien que je ne le connaisse pas plus que ça, j'aimais sa gueule.
Et merci à Flow pour les anecdotes, j'ai appris l'origine de So What, d'un musicien que j'apprécie particulièrement.

Libertin a dit…

Un petit tour en forme de baiser pour pardonner mes trop longues absences.
Très beau commentaire sur Dennis Hopper.
Merci.
Et une petite anecdote pour sourire. Il déclara vers la fin de sa vie : "Chaque fois que je prends la parole en public, je suis assez angoissé parce qu’on s’attend à ce que je sois Dennis Hopper. Mais je ne sais pas au juste qui est Dennis Hopper...".
L

waid a dit…

chere amie merci pour cet hommage je ne connaissais de lui que l'artiste et le collectionneur , je n'ai jamais vu easy rider ... oui je n'ai aucune culture cinematographique

vous connaissant un peu je comprends que c'est le personnage du marchand de basquiat que vous retenez de sa fimpgraphie